vendredi 3 juin 2016

Magistrats & Manigances - partie 1


Bonjour tout le monde,

Je l'avais promis, je reviens donc pour parler Chine ancienne - une de mes vieilles passions, comme le savent ceux qui suivent mes travaux depuis un moment. Et justement, parmi eux certains se souviennent peut-être de mon article dans le livre Jouer avec l'Histoire : traiter l'histoire au travers du genre. J'y développai la thèse que si l'histoire était un fabuleux background à utiliser dans un jeu de rôle, il pouvait s'avérer nécessaire de l'aborder par le biais d'un genre précis avec d'en faciliter l'appropriation - comme se lancer dans la France de Richelieu grâce à des histoires de type cape & épées. Et j'utilisai tout au long de mon texte deux exemples : Qin - les Royaumes combattants, qui traitait de l'antiquité chinoise par le biais du wu xia pian, et Magistrats & Manigances, qui proposait de se la jouer polar chinois façon Juge Ti. 
Mais ! s'exclame le lecteur interloqué. Ce Magistrats & Manigances n'existe pas ! Et oui, c'est vrai - du moins, il n'existait pas. C'était un exemple fictif me permettant d'illustrer ma théorie et de compléter celui de Qin en démontrant que s'attaquer à la Chine ancienne pouvait donner deux jeux radicalement différents selon le genre utilisé. Cependant, l'idée d'écrire un jeu façon Juge Ti me trottait dans la tête depuis - en grand fan de l'oeuvre de Van Gulik. Interpréter des enquêteurs dans le système judiciaire de la dynastie Tang, démasquer les trafiquants et les meurtriers, trancher des litiges houleux, ménager la susceptibilité des puissants tout en restant incorruptible...
Et finalement, l'opportunité s'est présentée - après une petite histoire éditoriale houleuse. A l'origine, il y a le projet D3 de Cédric Ferrand : un corpus de règles permettant de jouer des enquêtes et divers décors de jeu pour varier les approches - le tout étant prévu pour une sortie chez l'éditeur John Doe. Connaissant mes inspirations, Cédric me proposa d'écrire un setting Chine ancienne selon l'idée du Magistrats & Manigances de mon article et bien sûr, j'acceptai. Pour diverses raisons dont j'ignore tout, ce beau projet ne vit pas le jour chez cet éditeur. Mais quelques temps après, D3 resurgit au détour des pages de Casus Belli - magazine dont j'étais alors déjà un collaborateur régulier. La rédaction le publiait en trois parties afin de fournir un jeu complet aux lecteurs assidus. Il n'en fallait pas plus pour que Magistrats & Manigances revienne au premier plan : à mon tour, je proposai aux boss de Casus Belli de le publier selon ce même format : trois parties pour une taille bien confortable permettant de développer ce projet.
Je me mis alors en quête d'un coauteur. En effet, je souhaitai que l'enquête soit réellement au cœur de Magistrats & Manigances : or il s'agit d'un genre délicat à traiter et qui peut s'avérer très frustrant pour peu que le système n'y soit pas adapté. Je jetai mon dévolu sur Benjamin Kouppi - alias MacBesse sur les forums - car en bon fan de jeux alternatifs, il allait me permettre de sortir de ma zone de confort et me forcer à penser "out of the box", comme disent les anglo-saxons. Et cette collaboration fut une totale réussite ! Benjamin me poussa dans mes retranchements en me proposant des idées très loin de mes habitudes, ce qui nous permit de concevoir des règles aux petits oignons après un énorme travail de réflexion et de conceptualisation. De plus, en tant qu'historien, il apporta une précision sans faille dans les textes de background - Magistrats & Manigances est donc inattaquable à ce niveau (et s'il reste des erreurs, elles sont de mon fait - soyez-en sûrs). 
La cerise sur le gâteau allait arriver avec le dessinateur chargé d'illustrer tout cela : rien moins que Monsieur le Chien (là encore sur une idée de Benjamin - véritable bonne fée de ce projet), fameux bédéaste / blogueur mais également vieux rôliste, qui apporta son style très franco-belge à notre travail - une touche classique qui sied à la perfection au décor de jeu.
Cette conjugaison de talents (textes de Benjamin et moi, dessins de Monsieur le Chien - le tout édité par Casus Belli) a poussé Magistrats & Manigances bien plus loin que je ne l'aurais rêvé quand le projet prit forme dans mon imagination - il y a de cela presque 10 ans. Le jeu est prévu à paraître dans les #19, 20 et 21 de Casus Belli et le premier de ce triptyque doit sortir en PDF dès aujourd'hui.
Benjamin a d'ailleurs longuement parlé du jeu sur Radio Rôliste, un podcast que je vous invite à écouter afin d'en apprendre encore plus ! 

Comment se compose Magistrats & Manigances
Dans le #19 de Casus Belli se trouve donc la première partie. Celle-ci contient le background général du jeu, tout ce qui concerne la Chine de la dynastie Tang : un bref historique, la société, la religion, le système pénal, etc. Tout ce dont a besoin le meneur de jeu pour se plonger dans cet univers pas forcément familier (nous ne pouvons que recommander la lecture du Juge Ti de Van Gulik, ainsi que les bandes-dessinées du Juge Bao pour approfondir). Puis est proposé le système de jeu. J'ai d'autant moins de scrupules à l'affirmer qu'il est à 90% l'oeuvre de Benjamin : c'est une vraie petite perle qui met l'enquête au cœur des parties et permet aussi bien de suivre des investigations pré-écrites que d'improviser des affaires à la volée. La création de personnage se fait de façon très simple : le joueur choisit un Statut (son "métier") et un Tempérament (son "caractère"), chacun lui offrant quelques capacités particulières. Puis il a accès à des Procédures : des compétences d'enquête ouvrant pour chacune 6 possibilités à choisir. L'astuce étant que selon le résultat du jet de dés, le joueur sélectionne un certain nombre de ces issues et le meneur de jeu en sélectionne d'autres. Pas de notion de réussite ou d'échec (et donc jamais d'impasse) : chaque lancer de dés permet de faire avancer l'histoire - seule la direction prise est influencée... Diverses options ancrent encore plus le jeu dans le genre abordé : comme la possibilité de se créer des Contacts ou le fait que les joueurs - s'ils incarnent individuellement des Assistants du Magistrat - interprètent ce dernier de façon collective lors des scènes de Tribunal, quand il faut enfin juger les coupables ou trancher les litiges. Et que les fans de magie se rassurent : il est parfaitement possible de créer un taoïste capable d'interroger les âmes des défunts ou les esprits errants - ces croyances faisant alors totalement partie de la vie des Chinois de l'époque. 
Casus Belli #20 offrira un décor de jeu prêt à l'emploi : un district situé au croisement de la Route de la Soie et du Fleuve jaune - un poumon économique de la province et donc un vrai nid de vipères où le Magistrat et ses Assistants devront savoir se faire une place. Si un meneur de jeu féru du Juge Ti saura créer son propre district à la volée, nul doute que celui proposé aidera les profanes à se lancer dans la Chine de la Dynastie Tang sans crainte. Enfin, Casus Belli #21 proposera un scénario composé de plusieurs affaires sur lesquelles les Assistants auront à enquêter ainsi que des conseils sur la façon de créer ou improviser de telles affaires. De tout cela, je reviendrai parler en temps utile.

Il ne me reste plus qu'à vous encourager à vous procurer Casus Belli #19 afin d'y découvrir la première partie de Magistrats & Manigances. Si vous êtes fans du Juge Ti, passionnés de Chine ancienne ou férus de jeux d'enquête, le travail que Benjamin et moi avons fourni devrait grandement vous intéresser. 
N'hésitez donc pas à découvrir l'Empire fleuri et ses nombreuses intrigues - entre lettrés ambitieux, fonctionnaires incorruptibles, marchands fortunés, courtisanes détentrices de bien des secrets, religieux pas toujours très pieux et bandits rôdant à la lisière des vertes forêts !
A bientôt pour de nouvelles actualités ! 

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